Effets du haut vacuum sur la santé des érablières : résultats préliminaires


Au cours des 40 dernières années, le rendement en sirop à l’entaille a été multiplié par trois, grâce à des techniques modernes de collecte et de traitement de la sève. Les effets de cette augmentation de la récolte sur la santé des arbres à long terme sont encore inconnus. 


 

Depuis quelques années, un nombre croissant d’acériculteurs sont passés d’un vacuum standard (< 25 po Hg) à un haut vacuum (> 25 po Hg) permettant d’augmenter le rendement en sève récoltée. Cependant, les scientifiques ont constaté que l’entaillage peut réduire la croissance des arbres. Une étude a été menée pour déterminer si l’application d’un haut vacuum pouvait avoir un impact sur la croissance des érables et si ce prélèvement supplémentaire pouvait avoir un impact à long terme sur la fertilité du sol.

 

L’entaillage sous vide hypothèque la croissance des arbres de petit diamètre

Nous avons pris des données de croissance d’arbres individuels dans 47 érablières en Estrie équipées sous vacuum standard (< 25 po Hg) ou sous haut vacuum (> 25 po Hg) et qui ont été chaulés ou pas dans le passé. Les résultats indiquent, quel que soit le degré de vacuum, que les érables à sucre dans la classe de diamètre à hauteur de poitrine (DHP) de moins de 25 cm ont subi une baisse de croissance en surface terrière de l’ordre de 25 % lorsqu’ils ont commencé à être entaillés en raison de l’entaillage sous vide. Cette réduction de croissance n’a cependant pas été observée dans les érablières qui avaient été chaulées dans le passé. Des études antérieures ont également montré que l’entaillage peut causer une baisse significative de la croissance des érables.

 

 

Effet du haut vacuum sur la croissance des arbres

Dans près de la moitié de ces 47 érablières en Estrie, le haut vacuum y avait été appliqué depuis au moins cinq ans. Durant ce laps de temps, on n’a pas pu noter d’effet du haut vacuum sur la croissance des arbres comparativement au vacuum standard de moins de 25 po Hg. Il reste à voir si cet effet est cumulatif et à plus long terme.

 

Effet de l’acériculture sur le bilan nutritif du sol

L’activité acéricole peut avoir un impact significatif sur le bilan des éléments nutritifs du sol. Des études ont montré que les minéraux tels que le calcium (Ca), le potassium (K) et le magnésium (Mg) sont exportés par l’acériculture. La fertilité du sol peut également influer sur l’exportation des minéraux par l’acériculture. 

Le sirop d’érable contient des minéraux, dont du calcium, du potassium et du magnésium. Sa production moyenne par unité de superficie d’érablière est équivalente à une exportation du sol d’environ 40 kg/ha de calcium, 4 kg/ha de potassium et 1 kg/ha de magnésium sur 50 ans. Ces minéraux se retrouvent en grande partie dans la « râche », ou « pierre de sucre », qui s’accumule dans les casseroles de l’évaporateur et qui est séparée du sirop lors de la filtration. Certaines réactions chimiques ayant lieu lors de l’évaporation de la sève d’érable produisent des composés qui deviennent sursaturés et précipitent. Ces composés insolubles qui forment la râche sont constitués principalement de sels minéraux (Ca, Mg, K) et de sucres, le principal étant le malate de calcium.

 

 

Dans une étude, nous avons tenté de quantifier les sorties d’éléments minéraux des érablières via (1) la production de sirop, (2) l’extraction du bois lors d’aménagement forestier et (3) les pertes du sol par lixiviation, ainsi que les apports d’éléments minéraux provenant (4) de l’atmosphère par les précipitations et (5) de l’altération chimique des minéraux du sol dans deux régions, soit les Laurentides et les Appalaches. Les sols des Appalaches et des Laurentides se distinguent entre autres par leur texture et la taille de leurs réserves en potassium et en magnésium. 

Dans le scénario de base, on a considéré une récolte annuelle de 2,83 lb de sirop par entaille, soit la moyenne des 10 dernières années. En production acéricole, on procède généralement à un aménagement acérico-forestier; il faut donc aussi considérer le prélèvement des éléments minéraux que l’on fait par l’extraction du bois dans l’érablière. En moyenne, chaque 15 ans, les acériculteurs peuvent extraire de l’érablière jusqu’à 5 m2/ha de surface terrière. Suivant ce scénario sur 50 ans, le calcul des entrées et sorties du sol montre un bilan négatif du calcium dans les deux régions, de l’ordre de -1,0 à -1,7 kg de calcium par hectare par année, avec des exportations causées principalement par la récolte des arbres lors de l’aménagement forestier. La récolte de sève d’érable elle-même est non négligeable, mais représenterait seulement environ 9 % des exportations annuelles de calcium comparativement aux activités d’aménagement forestier qui représentent entre 68 et 74 % des exportations annuelles de calcium sur 50 ans. 

 

 

Effet du haut vacuum sur le bilan nutritif du sol

L’augmentation de la production de sirop avec l’emploi du haut vacuum ou l’obtention d’un rendement annuel élevé provoquerait des extractions supplémentaires de calcium des sols, et ce, dans les deux régions. Sur 50 ans, l’augmentation du rendement en sirop pourrait aller jusqu’à causer des extractions de calcium représentant entre 15 et 32 % des réserves en calcium du sol dans les Appalaches, et entre 9 et 27 % dans les Laurentides. Cependant, les sols des Appalaches ne devraient pas voir leurs réserves en potassium et magnésium diminuer, mais ceux des Laurentides devraient connaître une baisse du potassium, de l’ordre de 59 à 68 % durant cette période. En l’absence de l’acériculture, mais en conservant l’aménagement forestier, le bilan du sol s’améliore et deviendrait pratiquement à l’équilibre dans les deux régions.

L’emploi du haut vacuum augmente les rendements en sirop, mais demande une régie très serrée des fuites dans l’érablière et peut avoir des conséquences à long terme sur la santé des jeunes érables et sur la fertilité du sol. Il est important de suivre l’état de santé de son érablière afin de pouvoir réagir rapidement aux premiers signes de baisse de croissance ou de dépérissement.

 


En savoir plus

Pour consulter la note de recherche complète, visitez le site Internet www.mffp.gouv.qc.ca/le-ministere/publications

 

 

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