À Béthanie, la nature, ça marche!
Julie Perreault, dir. gén. et architecte paysagiste, Corporation de développement de la rivière Noire
Le projet « À Béthanie, la nature, ça marche! » consiste à développer deux sentiers pédestres basés sur la découverte, la préservation et la mise en valeur des milieux boisés. Ce rapport à la nature sera magnifié par des panneaux d’interprétation qui inviteront le visiteur à approfondir sa compréhension de l’écosystème. Ces aménagements publics et communautaires constituent un levier important de développement durable pour la municipalité.
Le territoire de la MRC d’Acton est riche d’un réseau complexe et diversifié d’écosystèmes agroforestiers comptant d’importants massifs boisés ayant un fort indice de qualité écologique. Selon la Corporation de développement de la rivière Noire (CDRN), il abritait en 2019 au moins 11 espèces floristiques ainsi que 8 espèces fauniques à statut précaire, en plus d’un des plus importants sites de ponte de la tortue des bois du Québec. Ce territoire constitue un patrimoine collectif de grande valeur dont il est important d’assurer la pérennité par une approche multiusage qui rallie les intérêts et les préoccupations de tous. Ainsi, sa mise en valeur est essentielle pour sensibiliser la population à son importance et renforcer la fierté collective et le sentiment d’appartenance.
Accessibilité publique, levier de protection
Paradoxalement, cette mise en valeur est parfois limitée par l’absence d’accès au territoire et à ses ressources. Dans la MRC d’Acton comme ailleurs au Québec, il y a eu privatisation des accès aux cours d’eau depuis plusieurs décennies, ce qui a pour conséquence une pénurie d’endroits et d’infrastructures pour accéder à la nature dans un cadre aménagé et sécurisé. Les dernières années, plus particulièrement celles de la pandémie, se sont avérées être un accélérateur de prises de conscience et d’initiatives collectives ayant révélé l’importance de ce besoin.
Cette dynamique a créé une nouvelle synergie permettant à la communauté de Béthanie de démontrer qu’elle souhaite participer au développement de sa région et avoir accès aux milieux naturels qui la composent. En parallèle, les tendances actuelles en tourisme démontrent que les citoyens recherchent des expériences respectueuses des communautés locales, de l’environnement naturel et basées sur la mobilité durable.
Besoins du milieu : connexions à la nature et à la culture
« À Béthanie, la nature, ça marche! » s’adresse à la population en général, qu’il s’agisse de citoyens de Béthanie, de la MRC ou de gens de l’extérieur du territoire voulant faire une randonnée ou une activité de plein air. Les nouveaux espaces conviennent à tous les profils d’usagers : aux familles avec tout-petits, aux aînés, aux couples, aux groupes ou aux solitaires.
Ils permettent de répondre aux besoins des personnes vivant à la campagne sans être propriétaires et qui n’ont pas d’endroit public pour accéder aux milieux naturels. Ils répondent aussi aux demandes des visiteurs qui recherchent une connexion avec la nature ou qui désirent prolonger leur visite champêtre dans l’une des autres attractions de la municipalité de Béthanie et des alentours.
En combinant l’environnement, le plein air et la culture, les deux sentiers du projet diversifient l’expérience touristique du secteur et redonnent accès au patrimoine naturel tout en le protégeant. De plus, ils mettent en valeur et font rayonner la culture et le talent artistique local.
Historique de la Halte-rivière Agnès-Favreau-et-Hector-Blanchard
L’idée de redonner aux citoyens et citoyennes un accès à leur rivière a germé en 2017 dans l’esprit allumé de monsieur Yvon Blanchard, résident engagé de la municipalité de Béthanie. Son initiative d’offrir un accès à la rivière Noire et d’en faire une petite réserve naturelle démontre l’intérêt de cet écosystème et a été soutenue par le conseil municipal. Le maire de l’époque, monsieur Boniface Dalle-Vedove, a entamé des discussions et procédures pour acquérir une parcelle de terrain longeant la rivière Noire sur le chemin de Béthanie et y a créé cet espace public unique dès 2019. Il est situé stratégiquement entre le vignoble Coteau des artisans et le site de l’Atelier du loisir, Médiévalys, sur la piste cyclable non balisée L’Orée des bois.
Le site était anciennement un pâturage et un lieu de baignade très fréquenté à Béthanie. Il est lié à l’histoire de la famille Blanchard, d’où son nom : halte-rivière Agnès-Favreau-et-Hector-Blanchard. Monsieur Yvon Blanchard est le fils d’Agnès Favreau et de Hector Blanchard et a grandi sur cette propriété. Au fil des ans, il y a observé des oiseaux, tels le héron et le martin-pêcheur, et des amphibiens, tels les rainettes et crapauds blancs, ainsi que des tortues.
Avec une équipe de 10 bénévoles, monsieur Yvon Blanchard y a réalisé un sentier en 2021. Tous les résidus de l’élagage ont été réduits en copeaux (BRF) sur place avant d’être redistribués sur la surface du sentier. En 2022, un stationnement de quelques places a été construit. Le maire de l’époque, monsieur Michel Côté, en compagnie de monsieur Blanchard, toujours impliqué dans le développement du projet, a alors approché l’équipe de la CDRN à la recherche de soutien pour poursuivre le développement de la halte-rivière.
Leviers de développement
La CDRN est une interlocutrice privilégiée de la MRC pour développer des projets visant l’appropriation des enjeux environnementaux et répondant aux besoins du milieu. Au fil des ans, l’OBNL a développé une expertise dans la conception de demandes de financement combinant différents programmes afin de soutenir la mise en valeur d’un environnement sain, favorisant l’amélioration du bien-être de la collectivité. L’appui et l’ancrage du projet dans son milieu sont essentiels pour bien répondre aux besoins, en assurer le déploiement, l’appropriation puis le rayonnement.
Pour le projet « À Béthanie, la nature, ça marche! », le montage financier repose sur un maillage entre le programme de Tourisme Montérégie – Entente de partenariat régional et de transformation numérique en tourisme 2022-2025-volet Collectif (EPRTNT), le programme Fonds de soutien aux projets structurants (FSPS) régional et l’Entente de développement culturel de la MRC d’Acton en plus de l’investissement de la municipalité de Béthanie elle-même.
Cette trame a permis de concevoir une vitrine exceptionnelle sur la nature et la culture de ce pan de territoire qui vient bonifier l’expérience offerte à la halte-rivière tout en ajoutant de nouveaux volets avec la création d’un deuxième tronçon de sentier pédestre et la conception d’une exposition permanente sur la faune et la flore de ces milieux. Ce partenariat a permis d’obtenir les fonds nécessaires pour mettre en valeur le site et pour développer des outils de transfert de connaissances et de sensibilisation en support aux actions d’aménagement.
Cela a permis de faire caractériser deux sites par des professionnels, d’étayer leur valeur biologique et de constituer les informations nécessaires à la création de panneaux d’interprétation. Ceux-ci feront connaître la biodiversité des sites aux visiteurs en leur permettant de mieux comprendre et de mieux connaître les interrelations entre les espèces observables en parcourant les sentiers. Les panneaux seront installés à partir de juin 2025.
Connaissances comme espace de dialogue
Des outils de communication sont indispensables dans ce projet de plein air, car ils offrent un moyen idéal de mettre en valeur le milieu, de communiquer avec les visiteurs, de générer des discussions et des prises de conscience en plus de stimuler de nouvelles idées. Il s’agit d’un aspect très significatif qui permet d’informer les publics ciblés afin de favoriser leur responsabilisation et leur engagement envers la protection de l’environnement.
Les panneaux de sensibilisation diffuseront des informations sur le patrimoine paysager de Béthanie, ses attraits et son histoire, permettant aux visiteurs de se connecter à la nature, à la culture locale et, par effet d’entraînement, à soi-même. Ce contact est essentiel pour apprendre à connaître, à aimer et par le fait même, à vouloir protéger. Le matériel n’est plus seulement informatif, il devient une source d’inspiration, il pique l’intérêt des visiteurs, leur donne envie d’en savoir plus et il les aide à comprendre l’importance de la zone et de ses ressources.
Art comme moteur d’engagement
La municipalité a choisi de magnifier ce rapport à la nature par une vision artistique qui enrichira l’expérience des sentiers et la compréhension de l’interrelation des éléments naturels qui constituent ces écosystèmes. Les illustrations ont été réalisées par la talentueuse artiste naturaliste d’Upton, madame Catherine Plante, et les textes ont été rédigés par l’autrice, madame Alexandra Gilbert, qui a des liens personnels avec la région. Magnifier ce rapport à la nature le fera entrer dans notre imaginaire collectif et dans nos cœurs.
Ce choix s’inscrit directement dans la politique culturelle de la MRC d’Acton. En vertu de redevances, les œuvres pourront être reproduites en tout ou en partie par la municipalité et la MRC dans sa campagne de promotion ou dans toute autre communication pertinente, ce qui permettra de mettre en valeur la culture locale et contribuera à renforcer le sentiment d’appartenance des citoyens.
Accès communautaire
Le deuxième sentier du projet « À Béthanie, la nature, ça marche! » sera un accès communautaire localisé sur le chemin Derome à Béthanie dans l’érablière non exploitée appartenant à monsieur Vincent Demers. Tout comme pour la halte-rivière Agnès-Favreau-et-Hector-
Blanchard, ce sentier sera accessible à partir du circuit cyclable non balisé L’Orée des bois, qui rejoint la piste cyclable principale de la MRC, La Campagnarde, tronçon numéro 4 de la Route verte, et ce, au cours de l’année 2025.
Ici aussi, le sentier offrira un contact avec un milieu aquatique en longeant un petit lac avant de traverser un ruisseau ainsi qu’une érablière mature et un ancien verger. L’aménagement d’infrastructures d’accueil, dont des panneaux d’interprétation et du mobilier (des tables à pique-nique, une toilette sèche et des supports à vélos), se fera sur une distance d’environ 1 800 mètres linéaires en boucle. Trois panneaux sont déjà en cours de confection et devraient être installés au plus tard à l’automne 2025.
Couleurs et saveurs locales
Ce volet du projet s’est développé dans le cadre d’un partenariat étroit entre la municipalité de Béthanie et madame Suzie Robidoux, propriétaire de l’entreprise Bordel de miel, spécialisée en objets d’art, en savons artisanaux et en tisanes. Elle donnera sa couleur unique au site, ce qui se révèle dans la toponymie poétique souhaitée : le Sentier de la forêt des oublis. Ce dernier vise à nous rappeler notre connexion et notre appartenance à la nature et avec les différentes espèces avec lesquelles nous cohabitons.
Cette entente mutuellement bénéfique permettra d’animer le site chaque saison grâce à une offre d’activités thématiques culturelles, éducatives et de loisirs pour les citoyens et les visiteurs tout en faisant rayonner l’entreprise. Des retombées sociales et économiques positives se développeront via des activités complémentaires à l’agriculture et la mise en valeur des savoir-faire issus du milieu, qui tendent vers la circularité, la résilience et la préservation des ressources naturelles. La participation des résidents et des résidentes, et la profitabilité à la collectivité serviront de tremplin à la promotion du site et à la préservation de la biodiversité des écosystèmes de la rivière Noire.
Conclusion
Les aménagements du projet « À Béthanie, la nature, ça marche! » ont été conçus, développés et réalisés de manière à minimiser leurs impacts sur l’intégrité écologique des milieux naturels. La mise en place de mesures d’atténuation adaptées visant à réduire les menaces sur la biodiversité a été planifiée. L’aspect patrimonial de la mise en valeur des sites fut au cœur du projet, permettant de mieux comprendre la dynamique des lieux et de ce qui les distingue. Il a fait appel aux savoir-faire locaux par l’intégration dans l’équipe de réalisation d’une artiste visuelle, d’une autrice, d’une entrepreneure et de citoyens ayant une fine connaissance du terrain. Ce sont aussi des producteurs locaux ou régionaux qui ont fourni l’essentiel des matériaux nécessaires à la réalisation.
Ces nouveaux sentiers permettront à la municipalité d’enrichir ses espaces publics, de diversifier son offre récréotouristique, d’élargir la palette d’activités réalisables sur son territoire, de mettre en valeur ses forêts et de cultiver la prise de conscience relative à l’environnement. Ces aménagements publics et communautaires constituent un levier important de développement durable pour la municipalité tout en ayant des retombées sociales, environnementales et économiques positives pour la région. Alors, n’hésitez pas à venir faire un tour, car « À Béthanie, la nature, ça marche! »
En savoir plus
Pour en savoir plus, veuillez contacter madame Julie Perreault, directrice générale et architecte paysagiste, Corporation de développement de la rivière Noire
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