Les arbres sont des êtres vivants. Ils sont beaux dans leurs imperfections, mais quand on se penche sur leur valeur monétaire, ces imperfections ont un coût. La taille des arbres est un moyen d’éliminer certains défauts que les arbres développent avec le temps. Voyons trois types de taille rencontrés en aménagement forestier : la taille phytosanitaire, la taille de formation et l’élagage.
Les défauts chez un arbre
En foresterie, on qualifie de défaut une caractéristique qui se développe sur un arbre et qui réduit la valeur utilitaire ou commerciale de son bois. Cela peut être un noeud, une courbure, un champignon, de la carie, une fente et plus encore. Ces défauts sont tout à fait courants et normaux avec le temps, et sont généralement dus à un insecte, une maladie, une blessure, une stress environnemental ou une prédisposition génétique. Par exemple, les feuillus développent facilement des défauts de forme ou de branchaison en milieu ouvert alors qu’en milieu forestier relativement fermé, ces derniers vont plus facilement former un fût intéressant, car la compétition pousse les arbres à croître davantage en hauteur.
La taille phytosanitaire
Cette taille vise à contrôler ou à prévenir la présence d’agents pathogènes en éliminant les pousses, branches ou tiges infectées. Elle s’applique à tous peuplements naturels ou plantations affectés par un insecte ou une maladie dont les effets peuvent être solutionnés ou amoindris par une ou plusieurs tailles. En pratique, elles concernent principalement les plantations de pins qui sont vulnérables au charançon du pin blanc, au chancre scléroderrien du pin et à la rouille vésiculeuse du pin blanc. En fait, on considère que les tailles phytosanitaires sont nécessaires à la rentabilité des plantations de pins.
Chaque maladie ou insecte affecte les arbres de façon différente. La taille phytosanitaire doit par conséquent être modulée au ravageur. Par exemple, les pousses apicales des jeunes pins blancs sont visées par le charançon du pin blanc. En les coupant les tiges affectées au bon endroit et au bon moment, puis en les brûlant, on empêche les populations de charançon de se multiplier et on maintient les niveaux de dommages des arbres assez bas (voir le Progrès Forestier, printemps 2025).
Feuillus prédisposés aux défauts de forme
Certaines essences doivent faire l’objet d’une plus grande surveillance en ce qui a trait aux tailles de formation.
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Le bouleau jaune a une mauvaise dominance apicale et une tendance à devenir branchu en milieu ouvert.
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Le cerisier tardif croît rapidement et nécessite un suivi annuel. Les tailles fortes, qui favorisent la formation de gourmands, sont à éviter.
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Le chêne rouge investit beaucoup dans ses branches en milieu ouvert. Les tailles doivent donc être fréquentes.
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L’érable argenté croît rapidement et a une propension à former des fourches.
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L’érable à sucre développe souvent des branches à angle aigu.
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Le frêne blanc a tendance à former des fourches lorsque son bourgeon terminal meurt.
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Les noyers cendré et noir forment rarement un fût naturel intéressant.
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Le tilleul développe de grosses branches rapidement.
En contrepartie, les essences à croissance plus lente ou à petites branches, comme les caryers cordiforme et ovale ou les chênes blanc, bicolore et à gros fruits, sont plus faciles d’entretien.
La taille de formation
Cette technique vise à corriger une malformation pouvant déformer la cime ou compromettre l’élongation de la tige en un fût droit et vertical, telle une fourche.
Ce traitement est rare chez les conifères comparativement aux feuillus qui développent plus facilement des défauts de forme. Une exception subsiste : les conifères affectés par le charançon du pin blanc. Ceux-ci ont tendance à développer des têtes multiples. Couper les têtes additionnelles peu de temps après leur formation permet à la tige résiduelle de se redresser et de former un fût unique et droit. Pour cette raison la taille phytosanitaire d’un pin blanc affecté par le charançon est généralement combinée à une taille de formation.
- La taille des feuillus -
Chez les feuillus, la taille de formation devrait commencer tôt, deux ou trois ans après la plantation d’un arbre, et se poursuivre plusieurs années, et ce, jusqu’à l’obtention d’un fût droit et rectiligne de 4 à 6 m.
Il n’est pas nécessaire de tailler l’ensemble des arbres d’une plantation. On devrait se concentrer sur les arbres d’avenir en sélectionnant entre 500 et 600 tiges par hectare, soit un arbre tous les 4 à 4,5 mètres environ. Lors de chacune des tailles, on enlève environ deux ou trois branches à la fois selon la densité de la cime (retirer au maximum un tiers de la masse foliaire). On veille à toujours garder les branches basses, fines et sans défauts au cours des premières années de vie d’un arbre. Cette masse foliaire compense pour le retrait des branches problématiques. Un certain volume de feuilles doit être conservé pour permettre à l’arbre de combler ses besoins.
- Étapes d’une taille de formation -
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Analyser la flèche terminale. Elle doit être unique, droite et bien définie.
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Couper des branches selon l’ordre de priorité suivant :
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Les branches mortes, malades ou brisées;
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Les fourches;
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Les branches à angle aigu avec le tronc;
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Les branches dont le diamètre est > 50 % du tronc à la hauteur de cette même branche.
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Raccourcir les branches fortes pouvant compétitionner la tête et limiter la croissance en hauteur. Cela permet de limiter leur gain en croissance en attendant les futurs élagages.
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Répéter l’opération dès que l’on constate une anomalie dans la cime, et ce, jusqu’à un maximum d’une fois par année. Viser l’obtention d’un fût droit et rectiligne d’environ 4 à 5 mètres en milieu ouvert et de 6 mètres en milieu forestier.
L’élagage
Cette taille vise à former une bille de pied exempte de noeud et de bonne valeur économique en coupant les branches basses suffisamment tôt.
L’élagage doit être progressif. Chaque opération doit couper les branches à partir du bas et s’arrêter aux branches vigoureuses, soit celles ayant peu de chances de mourir et de s’élaguer naturellement. Retirer ces branches causerait une blessure trop importante à cette étape de vie de l’arbre.
Pour maximiser notre investissement en temps, l’élagage devrait viser entre 300 et 500 arbres d’avenir par hectare bien répartis dans le peuplement, soit un arbre tous les 4,5 à 6 m. On coupe en priorité les branches de gros diamètre sans jamais retirer de branches au-delà du tiers inférieur du tronc (à l’exception des plantations très denses où l’on peut atteindre la moitié de la hauteur de l’arbre). L’opération peut ensuite être répétée tous les 4 ans.
Tout le processus d’élagage doit se faire suffisamment tôt de sorte que les noeuds formés en bas âge se recouvrent de nouveau bois avant la récolte. Plus précisément, l’élagage devrait être terminé au moment où le tronc atteint un diamètre de 10 cm à une hauteur de 4 à 6 m. Attention : il ne faut pas trop élaguer ou blesser l’arbre pendant le processus. Cela pourrait nuire à la qualité et à la vigueur des arbres.
La technique de coupe idéale
Tailler un arbre génère une blessure. Elle doit être la plus nette possible et cicatriser le plus rapidement possible. Pour ce faire, l’application de certaines règles de base est fortement suggérée.
- Petites branches (< 3 cm de diamètre) -
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Utiliser un outil manuel bien affûté (sécateur ou ébrancheur à longue perche);
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Éviter l’usage de la scie à chaîne;
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Réaliser une coupe nette et sans déchirure;
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Couper directement après le bourrelet cicatriciel lorsqu’il est visible ou selon un angle de
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30o s’il est non distinguable (Figure 4);
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Éviter de blesser le bourrelet cicatriciel.
- Grosses branches (> 3 cm de diamètre) -
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Utiliser une scie manuelle;
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Réaliser la coupe par étape (Figure 5) :
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Couper la branche de bas en haut à 30 cm du tronc sur le tiers de son diamètre;
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Couper de haut en bas au même niveau pour enlever la majorité de la branche;
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Couper le moignon restant près du bourrelet tel que décrit pour les petites branches.
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La cicatrisation
Ensuite, il faut laisser l’arbre cicatriser naturellement. Pour ce faire, il ne faut pas colmater la plaie en appliquant un enduit quelconque tel que du goudron ou de la peinture. Ces produits peuvent créer un milieu propice au développement de micro-organismes.
La période de coupe
Plusieurs moments dans l’année sont propices à la taille des arbres. Chez les arbres très jeunes, il suffit parfois de pincer l’extrémité d’une branche encore verte, en mai ou juin, avec les ongles. Sinon, voici les règles générales à suivre :
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Les branches mortes peuvent être coupées en tout temps;
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Les branches vertes de conifères de moins de 2 cm de diamètre peuvent
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être coupées en tout temps (mai et juin sont idéaux);
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Les branches vertes de feuillus de moins de 2 cm de diamètre peuvent être
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coupées en tout temps sauf lorsque le bois est gelé (mai et juin sont idéaux);
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Les branches vertes de plus de 2 cm de diamètre devraient être coupées
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entre la mi-août et le gel du bois;
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Aucune coupe ne devrait être faite pendant la montée de la sève, les
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grands froids ou les grandes chaleurs;
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Aucune coupe ne devrait viser un arbre affaibli.
Pour en savoir plus
Cet article est un extrait du Guide de plantation en forêt privée du sud du Québec dans un contexte de changements climatiques.