Face aux défis environnementaux et aux enjeux d’aménagement forestier sur certains territoires, de nouvelles initiatives émergent pour favoriser une gestion plus locale, mais tout aussi durable de la forêt et du bois. Pour ce faire, des organismes mettent en place des pratiques adaptées et respectueuses dites « à circuits courts » qui valorisent la mise en marché d’essences locales. Le but est de réduire les distances à parcourir pour acheminer les arbres récoltés vers les usines de transformation, réduisant du même coup l’empreinte carbone, tout en répondant aux besoins concrets des consommateurs. Voici deux modèles intéressants de circuits courts, alliant mise en marché locale et augmentation de la valeur des bois transformés.
Une coopérative misant sur la proximité
À Frelighsburg en Estrie, la Coopérative Bois d’Exception (CBE) propose une mise en marché du bois axée sur la proximité et la durabilité. Cette entreprise privilégie des circuits courts dans un rayon de 50 kilomètres en offrant aux producteurs forestiers une alternative aux grandes filières industrielles, tout en favorisant une économie locale respectueuse des écosystèmes.
Soucieuse de préserver l’équilibre des forêts, la coopérative privilégie des interventions à faible impact sur le territoire afin d’assurer une gestion responsable des ressources. Par exemple, l’utilisation de machinerie légère permet de limiter les perturbations au sol et de favoriser une régénération saine des forêts. Par ailleurs, des traitements peu intrusifs comme le jardinage forestier contribuent à maintenir une diversité d’essences et de stades de croissance, éléments essentiels à la résilience de l’écosystème des forêts de feuillus. Par la suite, le bois récolté par les membres est scié et séché dans les installations de la coopérative avant d’être vendu aux artisans locaux. Se concentrant sur de petits volumes, la coopérative met l’accent sur la qualité du matériau, répondant ainsi aux besoins spécifiques des ébénistes. Cette approche permet de valoriser les essences nobles tout en encourageant une foresterie durable.
Un modèle novateur de valorisation du bois urbain
Chaque année, des milliers d’arbres sont abattus en milieu urbain. Maladies, ravageurs, développement immobilier ou sécurité publique en sont les principales causes. Trop souvent, ces arbres finissent en copeaux ou enfouis sans aucune valorisation. Avec l’arrivée de l’agrile du frêne, cette situation a pris une ampleur inédite. Pourtant, au lieu d’être traité comme un déchet, ce bois pourrait devenir une ressource précieuse.
C’est précisément la mission du Centre de valorisation du bois urbain (CVBU), un organisme à but non lucratif fondé en 2016. En récupérant et transformant ces arbres urbains, il leur redonne une seconde vie, tout en structurant une filière locale fondée sur l’économie circulaire. Ce modèle allie préservation du patrimoine forestier urbain et retombées positives pour les collectivités. Plutôt que de laisser se perdre tout ce bois, le CVBU prend en charge tout le processus pour sa valorisation jusqu’au produit fini livré : de la récupération des arbres à l’usinage, en passant par le séchage, la transformation et la distribution. Ce bois devient alors une ressource précieuse pour les ébénistes et artisans et un produit fini utile pour nombre d’entreprises et d’organismes clients. Sous forme de mobilier, de planchers ou même de produits utilitaires comme des tuteurs d’arbres et des piquets à neige, le bois urbain trouve une multitude de débouchés. Cette approche réduit le gaspillage, soutient une consommation responsable et diminue l’empreinte carbone liée à l’importation de bois.
L’exemple du CVBU illustre le potentiel d’une foresterie urbaine repensée en mode économie circulaire. En misant sur des circuits courts et une gestion soucieuse des ressources, cette initiative s’impose comme une solution durable face aux défis environnementaux. Alors que la demande pour des matériaux écologiques ne cesse de croître, il est temps de considérer le bois urbain comme un atout, et non comme un résidu. Cette initiative, appliquée ou reproduite dans l’ensemble des milieux urbanisés, optimiserait la façon de concevoir la foresterie urbaine, en mettant l’accent sur la proximité, la durabilité et l’innovation.
Conclusion
Les initiatives comme la Coopérative Bois d’Exception et le Centre de valorisation du bois urbain démontrent qu’une gestion forestière de proximité et axée sur l’économie circulaire est possible et souhaitable. Les circuits courts réduisent l’empreinte carbone, stimulent l’économie régionale et favorisent un aménagement durable des ressources.
Dans un contexte où les enjeux environnementaux et économiques peuvent imposer de repenser nos modes de production et de consommation, ces initiatives offrent des alternatives utiles, concrètes et reproductibles. Elles illustrent qu’une foresterie durable peut passer par un ancrage territorial et communautaire et une reconnaissance de la valeur des matériaux récoltés localement.